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Domaines de Recherche

Dr. Matthew Machin-Autenrieth
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Matthew explorera les manifestations musicales (post)coloniales issues d’un héritage commun à l'Espagne et au Maroc, en mettant l’accent sur les collaborations entre musiciens de flamenco et musiciens arabo-andalous. Dans un genre de fusion souvent appelé « Flamenco-Andalous », artistes et institutions utilisent souvent la musique pour promouvoir les idéaux interculturels de la Convivencia - la coexistence pacifique présumée de Chrétiens, Juifs et Musulmans dans l’Espagne médiévale. En combinant des recherches historiques et ethnographiques, ce projet explorera la manière dont la musique peut construire et problématiser le concept d’une histoire culturelle commune au Maroc et à l’Espagne. Il retracera l'émergence du récit d'un héritage musical partagé lors du colonialisme espagnol au Maroc (1912-1956). Les affinités sonores présumées du flamenco et ses liens historiques avec la musique arabo-andalouse marocaine constituaient un outil utile à la légitimation du colonialisme espagnol, mais offraient également aux Marocains un moyen de négocier leur position dans le cadre des contraintes imposées par la domination coloniale. Cependant, cette création musicale ne s’est pas terminée avec l’indépendance du Maroc, et le récit colonial d’une « fraternité » hispano-marocaine continue d’influencer la création musicale. Etant donné le flux élevé d’immigration marocaine vers le Sud de l’Espagne, les fusions flamenco-andalouses sont souvent invoquées comme un modèle d'interculturalisme et une forme de diplomatie culturelle avec le Maroc. De tels projets peuvent cependant masquer les réalités de l'immigration, en promouvant une vision utopique des relations interculturelles qui cache l'exclusion sociale et le racisme, vécus par certains Marocains. Axée sur les projets institutionnels et la vie musicale des artistes-interprètes, cette recherche pose les questions suivantes : dans quelle mesure ces collaborations aident-elles ou entravent-elles l'intégration des immigrants marocains, et facilitent les échanges culturels? Comment le flamenco et ses fusions avec la musique marocaine influencent-ils la perception d’une histoire culturelle commune et l’héritage du colonialisme espagnol? Matthew travaille actuellement sur une monographie intitulée: Les fils de Ziryab: Flamenco-Andalous, Mémoire Coloniale et Migration Marocaine à travers le Détroit de Gibraltar. 

 
Dr. Samuel Llano

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Samuel est musicologue et historien culturel spécialisé dans les études urbaines et le transnationalisme. Sa contribution au projet explore les différentes manières dont la recherche sur la musique arabo-andalouse médiévale au cours de la première moitié du XXe siècle a été utilisée pour soutenir les projets d’identité contemporains concurrents, mais entrelacés en Europe et au Maroc. Les recherches espagnole et française sur la musique arabo-andalouse de l'époque du protectorat (1912-1956) ont été utilisées pour justifier la présence coloniale européenne au Maroc. Dans leurs écrits, les musicologues européens ont présenté la musique arabo-andalouse comme une tradition européenne née dans la péninsule ibérique méridionale au cours du Moyen-âge et transportée dans le nord de l'Afrique par les Musulmans et les Juifs expulsés d'Espagne dès la fin du Moyen-âge. Les chercheurs espagnols étaient convaincus que les Marocains avaient négligé et donc laissé intacte la musique andalouse du fait que la modernité n’avait pas atteint le Maroc. Dans leur esprit, l’Espagne avait le droit d’occuper le Maroc et de récupérer - mais en réalité de réinventer - une tradition qui appartenait à l’Espagne, et d’enseigner aux Marocains la valeur d’un héritage qui était aussi le leur. Les chercheurs français ont utilisé les recherches sur la musique arabe andalouse pour projeter sur le passé, ainsi que redéfinir la relation entre la France et l’Espagne en utilisant les tropes orientalistes,  pour « africaniser » et marginaliser l’Espagne. Les chercheurs marocains ont fondé le présent sur une image idéalisée de la culture et de la musique andalouse pour alimenter le nationalisme moderne et, ainsi, faire avancer le mouvement d’indépendance (1956). A l’aide de recherches d’archives, d’analyses textuelles et musicales, ainsi que de méthodes comparatives, la recherche de Samuel démontre que le poids musical du passé pèse lourdement sur le présent, suscitant des inquiétudes et dictant des politiques au travers desquelles les identités ethniques et nationales sont négociées au-delà des frontières transnationales et transcontinentales. Il travaille actuellement sur une proposition de livre provisoirement intitulé Les Echos d’un Présent Lointain: Imaginer la Musique Arabo-Andalouse en Espagne, en France et au Maroc, 1912-1956.

 

Samuel est l'auteur de deux livres. Sa première monographie, A Qui Appartient l’Espagne?: Négociation de la « Musique Espagnole » à Paris, 1908-1929 (OUP, 2012), analyse le poids de la propagande de guerre et des tropes orientalistes dans la formation du concept de la « musique espagnole » en Espagne et en France. A l’encontre des recherches qui étudient la « musique espagnole » comme une catégorie autonome, ce livre affirme qu’elle est le résultat d’un processus profondément transnational par lequel des compositeurs espagnols résidant à Paris (Falla, Albéniz) en prise avec les stéréotypes « orientalistes » et la dynamique impérialiste qui prévaut en France. En 2013, le livre a reçu le prix Robert M. Stevenson de la Société Américaine de Musicologie pour ses « recherches exceptionnelles dans le domaine de la musique ibérique et latino-américaine ». Son second livre, intitulé Des Notes Discordantes : Marginalité et Contrôle Social à Madrid, 1850-1930 (OUP, décembre 2018), analyse la manière dont la musique et les sons de rue de Madrid, en défiant l’ordre social et économique, ont déclenché le développement de nouvelles formes de contrôle social. La musique de rue et la musique populaire, loin d’être des épiphénomènes de la vie sociale, ont joué un rôle essentiel dans la modernisation et la rectification de la législation et du contrôle social dans les sociétés urbaines modernes.

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Dr. Stephen Wilford

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Les recherches de Stephen Wilford dans le cadre de ce projet portent sur les musiques algériennes, dans les contextes colonial et postcolonial, en mettant un accent particulier sur les traditions arabo-andalouses. Il explorera l'évolution et le statut changeant des musiques andalouses algériennes au cours de la transition vers l'indépendance nationale, ainsi que leur rôle ultérieur dans les discours sur l'arabisation et le nationalisme collectif. Ses travaux combineront recherches historiques et ethnographiques, et viseront à situer les musiques andalouses algériennes dans un climat sociopolitique en rapide évolution tant à l’échelle nationale qu’internationale. Il s'intéresse particulièrement aux mécanismes, institutions et discours qui soutiennent et maintiennent les pratiques andalouses en Afrique du Nord et dans les réseaux transnationaux de la diaspora. Tout en veillant à ne pas s'appuyer sur des binaires récurrents et réducteurs (coloniaux et postcoloniaux, passés et présents, algériens et français, etc.), ses recherches interrogeront la manière dont les pratiques andalouses algériennes sont restées en dialogue avec d'autres musiques et cultures. 

 

Parallèlement à ce travail sur Andalusi, Stephen s’intéresse aussi aux pratiques musicales algériennes au sens large, et particulièrement aux relations et aux rencontres musicales entre l’Algérie et la France. Cela inclut des recherches sur les cultures musicales françaises « colonisatrices » dans l’Algérie coloniale, y compris celles concernant les Musiques d’Art et de Jazz Occidentales, et l’émergence d’une scène hip-hop franco-algérienne dynamique à partir des années 1990. Il s'intéresse particulièrement à la manière dont le hip-hop franco-algérien a créé non seulement des liens entre l'Europe et l'Afrique du Nord, mais aussi des liens avec la culture afro-américaine.

 

Stephen est un cinéaste ethnographique. Il travaillera avec d'autres membres de l'équipe pour la production de contenu cinématographique sur un certain nombre de thèmes qui sont au cœur des objectifs du projet.

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Dr. Vanessa Paloma Duncan Elbaz

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Vanessa concentrera son travail sur les utilisations personnelles et officielles de la voix juive dans la construction d’une identité nationale et transnationale. S’appuyant sur des travaux d’archive, des histoires orales et des analyses de discours, ses recherches porteront sur le rôle que la musique juive et les musiciens ont joué dans les interactions culturelles coloniales et postcoloniales. La forte mobilité des Marocains juifs au cours du dernier siècle, ainsi que leurs affiliations linguistiques et culturelles multiples et simultanées, a créé un environnement qui brouille les tropes officiels d’appartenance et de non-appartenance. Cet espace constitue un terreau idéal pour la (re)négociation des identités établies pour la majorité du groupe dans son ensemble. Les recherches de Vanessa montrent que la création du patrimoine du répertoire juif en Espagne et au Maroc au cours du siècle dernier suit un modèle soutenu par le discours intellectuel philosépharade qui a débuté avant le colonialisme espagnol au Maroc.   

Ses recherches explorent également la façon dont les institutions officielles, tant marocaines qu’espagnoles, ont raconté la voix de la minorité juive tout au long d’un siècle de recherches et de diplomatie culturelle. En examinant par-delà les représentations officielles des voix minoritaires, on peut percevoir l’impact des performances des répertoires « juifs » tant par les différents interprètes et activistes culturels juifs que par les non-juifs. Ainsi, ses recherches révèlent la lente et complexe évolution de la construction des identités nationales à travers la musique, l’histoire et l’enchevêtrement entre récréation et réinvention de la mémoire.  

Elle travaille actuellement sur une proposition de livre provisoirement intitulée : De votre Bouche aux Cieux : (Trans)Nationalisme, Diversité et Musique Juive en Espagne et au Maroc (1890-2020).

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